
Introduction
« Princeps legibus solutus est »[1]. Cette maxime d’Ulpien, signifiant que « le Prince est au-dessus des lois »[2], est rapportée par Vincent Dussart, à propos du Parlement[3]. Le Prince désigne pourtant généralement le Monarque[4], ou par métaphore le Président de la République[5]. Même si le Parlement[6] est présenté comme « la figuration du souverain »[7], parce que constitué des représentants de la Nation[8] et chargé d’exprimer la volonté générale par la loi[9], il a été relégué au second plan de l’architecture institutionnelle[10] et constitutionnelle[11] de nombreux États[12]. Ce n’est donc pas pour l’étendue générale de ses prérogatives que le Parlement est assimilé au Prince, mais en raison de l’exorbitance de son régime financier, autrement dit, de son autonomie financière[13], objet de notre présente réflexion.
[1] Jean Gicquel, Jean-Éric Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, LGDJ, 2022, p. 515.
[2] Dans la même veine, Ulpien relevait que « Ce qui plaît au Prince a force de loi » (Quod principi placuit legis viogorem habet).
[3]Harold Desclodures, Vincent Dussart, Laurent Domingo, « L’autonomie financière des assemblées parlementaires au sein des États unitaires en Europe », Gestion et Finances publiques, 2018, n°5, pp. 70-82, à la p. 73.
[4] Olivier Gohin, Droit constitutionnel, Paris, LexisNexis, 2019, p. 216.
[5] Voir Frédéric Joël Aïvo, Le président de la République en Afrique noire francophone. Genèse, mutations et avenir de la fonction, Dakar, L’Harmattan, 2007.
[6] Voir Épiphane Sohouénou, Hygin Faust Kakaï, Marc Ollivier (dir.), Le Parlement en Afrique, Actes du colloque international organisé au Bénin du 23 au 26 septembre 2019, L’Harmattan, Dakar, 2021 ; Kossi Somali, Le parlement dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique. Essai d’analyse comparée à partir des exemples du Bénin, du Burkina Faso et du Togo, Thèse de doctorat, Université du Droit et de la Santé de Lille 2, 2008.
[7] Carré de Malberg, cité par Jean Gicquel, Jean-Éric Gicquel, op. cit., p. 175.
[8] Ferdinand Mélin-Soucramanien, Pierre Pactet, Droit constitutionnel, Paris, Sirey, 2023, p. 117 ; Olivier Gohin, op. cit., p. 216.
[9] Conseil constitutionnel ivoirien, Avis n° 2005-013/CC/SG du 15 décembre 2005, 4e considérant.
[10] L’on relève par exemple que les parlementaires ne sont plus les seuls oints du peuple. Le Président, qui apparaît comme la première personnalité dans de nombreux États, en Afrique noire francophone notamment, peut être aussi désigné au suffrage universel. Voir par exemple, l’article 55 de la Constitution de la Côte d’Ivoire de 2016, l’article 37 de la Constitution du Burkina Faso de 1991, l’article 42 de la Constitution du Gabon de 2024. Au Togo cependant, le Président est élu par les parlementaires, depuis l’adoption de la Constitution de 2024 (voir article 35).
[11] Dans la plupart des Constitutions, les dispositions sur le Parlement viennent après celles relatives à l’Exécutif. À titre d’exception, voir cependant la Constitution du Togo de 2024, laquelle évoque le Parlement avant l’Exécutif.
[12] Jean Gicquel, Jean-Éric Gicquel, op. cit., p. 787.
[13] Nicaise Médé, « L’autonomie financière des assemblées parlementaires en Afrique francophone », RFFP, avril 2009, n°109, pp. 271-288 ; Harold Desclodures, Vincent Dussart, Laurent Domingo, op. cit., p. 73.