La figure antagoniste du procès pénal est commune à tous les systèmes juridiques étatiques ; le prétoire criminel mettant en scène un individu aux prises avec la machine répressive de l’État[1]. Cet antagonisme renvoie l’image d’une confrontation judiciaire se tenant, en principe, entre la société et l’auteur de l’infraction. Une telle configuration des joutes au sein de l’arène judiciaire criminelle conduit à exclure la victime comme protagoniste des hostilités opposant le ministère public et la personne mise en cause. En effet, quel que soit le système juridique considéré, ni la présence de la victime ni son identification ne sont indispensables au déclenchement ou au déroulement du procès pénal[2]. La répression internationale des crimes, elle aussi, plutôt tournée vers la punition des coupables de graves violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire, a longtemps mis les victimes en marge des procès de leurs bourreaux[3].
[1] R. MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel, Tome I, Problèmes généraux de la science criminelle, droit pénal général, Dalloz, 2000, 7ème éd., § 108.
[2] La solution vaut tant pour le système de common law que pour le modèle de droit continental où la place de la victime dans le procès pénal est généralement exagérée. Ainsi, même en droit interne de tradition romano-germanique, il n’est pas, en principe, obligatoire qu’une victime dépose plainte ou soit identifiée dans la cause pour l’engagement du procès pénal. Le parquet y est même fondé à poursuivre l’auteur de l’infraction contre l’avis de la victime. Sur ce point, l’article 2, alinéa 2 du Code de procédure pénale français dispose que « La renonciation à l’action civile ne peut arrêter ni suspendre l’exercice de l’action publique (…) ».
[3] S. PELLET, « La place de la victime », in H. ASCENSIO, E. DECAUX et A. PELLET (dir.), Droit international pénal, Paris, A. Pedone, 2012, 2ème éd., pp. 933 -944.